🪀 Le Chateau De Ma Mere Torrent
Onlui apporta alors un rĂ´ti de cerf et d’autres gibiers en quantitĂ© c’est de la vaisselle d’or qu’il y avait sur la table du roi, et de grands hanaps Ă couvercles, et de très beaux chandeliers d’or qui souteÂnaient de grosses chandelles - mais la clartĂ© qui inondait le château obscurcissait la leur. C’est alors que sortirent d’une chapelle deux, demoiselles :
Lechâteau de ma mère. Le château de ma mère en Streaming. Disponible dans une option payante. Films-Comédies dramatiques. Non diffusé en ce moment à la télévision. Films-Comédies dramatiques. Chaque fin de semaine et en été le jeune Marcel et sa famille passent leurs vacances dans les collines au-dessus de Marseille. Chaque fin de semaine
rZqPL3z. Le Château de ma mère – Extrait Château d’Astros Le temps passe, et il fait tourner la roue de la vie comme l’eau celle des moulins. Cinq ans plus tard, je marchais derrière une voiture noire, dont les roues étaient si hautes que je voyais les sabots des chevaux. J’étais vêtu de noir, et la main du petit Paul serrait la mienne de toutes ses forces, on emportait notre mère pour toujours. De cette terrible journée, je n’ai aucun autre souvenir, comme si mes quinze ans avaient refusé d’admettre la force d’un chagrin qui pouvait me tuer. Pendant des années, jusqu’à l’âge d’homme, nous n’avons jamais eu le courage de parler d’elle. Puis, le petit Paul est devenu très grand. Il me dépassait de toute la tête, et il portait une barbe en collier, une barbe de soie dorée. Dans les collines de l’Etoile, qu’il n’a jamais voulu quitter, il menait son troupeau de chèvres ; le soir, il faisait des fromages dans des tamis de joncs tressés, puis sur le gravier des garrigues, il dormait, roulé dans son grand manteau il fut le dernier chevrier de Virgile. Mais à trente ans, dans une clinique, il mourut. Sur la table de nuit, il y avait son harmonica. Mon cher Lili ne l’accompagna pas avec moi au petit cimetière de La Treille, car il l’y attendait depuis des années, sous un carré d’immortelles en 1917, dans une noire forêt du Nord, une balle en plein front avait tranché sa jeune vie, et il était tombé sous la pluie, sur des touffes de plantes froides dont il ne savait pas les noms… Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliables chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants. Encore dix ans, et je fondai à Marseille une société de films. Le succès couronna l’entreprise, et j’eus alors l’ambition de construire, sous le ciel de Provence, la Cité du Cinéma » ; un marchand de biens » se mit en campagne, à la recherche d’un domaine » assez grand pour accueillir ce beau projet. Il trouva mon affaire pendant que j’étais à Paris, et c’est par le téléphone qu’il m’informa de sa découverte. Mais il m’apprit en même temps qu’il fallait conclure la vente en quelques heures, car il y avait d’autres acheteurs. Son enthousiasme était grand, et je le savais honnête j’achetai ce domaine sans l’avoir jours plus tard, une petite caravane de voitures quitta les studios du Prado. Elle emportait les hommes du son, les opérateurs de la prise de vues, les techniciens des laboratoires. Nous allions prendre possession de la terre promise, et pendant le voyage, tout le monde parlait à la fois. Nous franchîmes une très haute grille, déjà ouverte à deux fond d’une allée de platanes centenaires, le cortège s’arrêta devant un château. Ce n’était pas un monument historique, mais l’immense demeure d’un grand bourgeois du Second Empire il avait dû être assez fier des quatre tours octogonales et des trente balcons de pierre sculptée qui ornaient chaque façade…Nous descendîmes aussitôt vers les prairies, où j’avais l’intention de construire les trouvai des hommes qui dépliaient des chaînes d’arpenteurs, d’autres qui plantaient des jalons peints en blanc, et je regardais orgueilleusement la naissance d’une grande entreprise, lorsque je vis au loin, en haut d’un remblai, une haie d’arbustes… Mon souffle s’arrêta et, sans en savoir la raison, je m’élançai dans une course folle à travers la prairie et le temps. Oui, c’était là . C’était bien le canal de mon enfance, avec ses aubépines, ses clématites, ses églantiers chargés de fleurs blanches, ses ronciers qui cachaient leurs griffes sous les grosses mûres grenues…Tout le long du sentier herbeux, l’eau coulait sans bruit, éternelle, et les sauterelles d’autrefois, comme des éclaboussures, jaillissaient en rond sous mes pas. Je refis lentement le chemin des vacances, et de chères ombres marchaient près de quand je le vis à travers la haie, au-dessus des platanes lointains, que je reconnus l’affreux château, celui de la peur, de la peur de ma pendant deux secondes, que j’allais rencontrer le garde et le chien. Mais trente années avaient dévoré ma vengeance, car les méchants meurent aussi. Je suivis la berge c’était toujours une passoire », mais le petit Paul n’était plus là pour en rire, avec ses belles dents de lait…Une voix au loin m’appela je me cachai derrière la haie, et j’avançai sans bruit, lentement, comme autrefois… Je vis enfin le mur d’enceinte par-delà les tessons de la crête, le mois de juin dansait sur les collines bleues ; mais au pied du mur, tout près du canal, il y avait l’horrible porte noire, celle qui n’avait pas voulu s’ouvrir sur les vacances, la porte du Père Humilié…Dans un élan de rage aveugle, je pris à deux mains une très grosse pierre, et la levant d’abord au ciel, je la lançai vers les planches pourries qui s’effondrèrent sur le passé. Il me sembla que je respirais mieux, que le mauvais charme était dans les bras d’un églantier, sous des grappes de roses blanches et de l’autre côté du temps, il y avait depuis des années une très jeune femme brune qui serrait toujours sur son cœur fragile les roses rouges du colonel. Elle entendait les cris du garde, et le souffle rauque du chien. Blême, tremblante, et pour jamais inconsolable, elle ne savait pas qu’elle était chez son fils. » Marcel Pagnol – Le Château de ma mère 34RL1H3 Copyright Institut Français de Psychanalyse
Parce que Julien Ciamaca quitte le cinéma aprés ce diptyque...dont il est la vedetteMarcel à grandi. L'enfant de "La gloire de mon père" est devenu un adolescent, presque un jeune homme... Au coeur de l'été provencal, la découverte d'un raccourci va lui ouvrir les portes d'un domaine dont il ingnore tout l'amour !1 min avant2 min aprèsLes avis sens critiqueLes + de filmo1 min avantAlors là attention nous abordons ici un pan entier du patrimoine littéraire et cinématographique français Car oui, ce Château de ma mère, faisant suite à La gloire de mon père et précédant Le temps des secrets est un triptyque publié par Marcel Pagnol à la fin ses années œuvre nostalgique, familiale et sentimentale qui connut un grand succès avant d’être adaptée des années plus tard sur grand écran. Le thème est simple il s’agit pour l’auteur de raconter sa jeunesse, entre enfance, adolescence et vie d’homme, dans cette Provence qui est à la fois son berceau familial et celui de son Yves Robert qui s’est chargé, comme pour le premier volet La gloire de mon père de la difficile mission de porter à l’écran en 1990 ces livres emblématiques, adorés du public, étudiés à l’école, confiant à Philippe Caubère et Nathalie Roussel les rôles des parents Pagnol et à l’épatant Julien Ciamaca celui du jeune Marcel… Dans le même genre vous pouvez trouver MONSIEUR IBRAHIM ET LES FLEURS DU CORAN L'éducation sentimentale prend parfois d'étranges détours et dépend aussi d'étranges rencontres, que l'on soit à Paris ou en Provence... ou encore LA GLOIRE DE MON PERE Deux films construits comme un diptyque et qui se complètent à la perfection....
Le chateau des Carpathes Le château des Carpathes par Jules Verne I Cette histoire n'est pas fantastique, elle n'est que romanesque. Faut-il en conclure qu'elle ne soit pas vraie, étant donné son invraisemblance ? Ce serait une erreur. Nous sommes d'un temps où tout arrive, - on a presque le droit de dire où tout est arrivé. Si notre récit n'est point vraisemblable aujourd'hui, il peut l'être demain, grâce aux ressources scientifiques qui sont le lot de l'avenir, et personne ne s'aviserait de le mettre au rang des légendes. D'ailleurs, il ne se crée plus de légendes au déclin de ce pratique et positif XIXe siècle, ni en Bretagne, la contrée des farouches korrigans, ni en Ecosse, la terre des brownies et des gnomes, ni en Norvège, la patrie des ases, des elfes, des sylphes et des valkyries, ni même en Transylvanie, où le cadre des Carpathes se prête si naturellement à toutes les évocations psychagogiques. Cependant il convient de noter que le pays transylvain est encore très attaché aux superstitions des premiers âges. Ces provinces de l'extrême Europe, M. de Gérando les a décrites, Élisée Reclus les a visitées. Tous deux n'ont rien dit de la curieuse histoire sur laquelle repose ce roman. En ont-ils eu connaissance ? peut-être, mais ils n'auront point voulu y ajouter foi. C'est regrettable, car ils l'eussent racontée, l'un avec la précision d'un annaliste, l'autre avec cette poésie instinctive dont sont empreintes ses relations de voyage. Puisque ni l'un ni l'autre ne l'ont fait, je vais essayer de le faire pour eux. Le 29 mai de cette année-là , un berger surveillait son troupeau à la lisière d'un plateau verdoyant, au pied du Retyezat, qui domine une vallée fertile, boisée d'arbres à tiges droites, enrichie de belles cultures. Ce plateau élevé, découvert, sans abri, les galernes, qui sont les vents de nord-ouest, le rasent pendant l'hiver comme avec un rasoir de barbier. On dit alors, dans le pays, qu'il se fait la barbe - et parfois de très près. Ce berger n'avait rien d'arcadien dans son accoutrement, ni de bucolique dans son attitude. Ce n'était pas Daphnis, Amyntas, Tityre, Lycidas ou Mélibée. Le Lignon ne murmurait point à ses pieds ensabotés de gros socques de bois c'était la Silvalaque, dont les eaux fraîches et pastorales eussent été dignes de couler à travers les méandres du roman de l'Astrée. Frik, Frik du village de Werst - ainsi se nommait ce rustique pâtour -, aussi mal tenu de sa personne que ses bêtes, bon à loger dans cette sordide crapaudière, bâtie à l'entrée du village, où ses moutons et ses porcs vivaient dans une révoltante prouacrerie -, seul mot, emprunté de la vieille langue, qui convienne aux pouilleuses bergeries du comitat. _L'immanum pecus_ paissait donc sous la conduite dudit Frik, - immanior ipse. Couché sur un tertre matelassé d'herbe, il dormait d'un oeil, veillant de l'autre, sa grosse pipe à la bouche, parfois sifflant ses chiens, lorsque quelque brebis s'éloignait du pâturage, ou donnant un coup de bouquin que répercutaient les échos multiples de la montagne. Il était quatre heures après midi. Le soleil commençait à décliner. Quelques sommets, dont les bases se noyaient d'une brume flottante, s'éclairaient dans l'est. Vers le sud-ouest, deux brisures de la chaîne laissaient passer un oblique faisceau de rayons, comme un jet lumineux qui filtre par une porte entrouverte. Ce système orographique appartenait à la portion la plus sauvage de la Transylvanie, comprise sous la dénomination de comitat de Klausenburg ou Kolosvar. Curieux fragment de l'empire d'Autriche, cette Transylvanie, l'Erdely » en magyar, c'est-à -dire le pays des forêts ». Elle est limitée par la Hongrie au nord, la Valachie au sud, la Moldavie à l'ouest. Étendue sur soixante mille kilomètres carrés, soit six millions d'hectares - à peu près le neuvième de la France -, c'est une sorte de Suisse, mais de moitié plus vaste que le domaine helvétique, sans être plus peuplée. Avec ses plateaux livrés à la culture, ses luxuriants pâturages, ses vallées capricieusement dessinées, ses cimes sourcilleuses, la Transylvanie, zébrée par les ramifications d'origine plutonique des Carpathes, est sillonnée de nombreux cours d'eaux qui vont grossir la Theiss et ce superbe Danube, dont les Portes de Fer, à quelques milles au sud [La mille hongrois vaut environ 7 500 mètres.], ferment le défilé de la chaîne des Balkans sur la frontière de la Hongrie et de l'empire ottoman. Tel est cet ancien pays des Daces, conquis par Trajan au premier siècle de l'ère chrétienne. L'indépendance dont il jouissait sous jean Zapoly et ses successeurs jusqu'en 1699, prit fin avec Léopold Ier, qui l'annexa à l'Autriche. Mais, quelle qu'ait été sa constitution politique, il est resté le commun habitat de diverses races qui s'y coudoient sans se fusionner, les Valaques ou Roumains, les Hongrois, les Tsiganes, les Szeklers d'origine moldave, et aussi les Saxons que le temps et les circonstances finiront par magyariser » au profit de l'unité transylvaine. A quel type se raccordait le berger Frik ? Était-ce un descendant dégénéré des anciens Daces ? Il eût été malaisé de se prononcer, à voir sa chevelure en désordre, sa face machurée, sa barbe en broussailles, ses sourcils épais comme deux brosses à crins rougeâtres, ses yeux pers, entre le vert et le bleu, et dont le larmier humide était circonscrit du cercle sénile. C'est qu'il est âgé de soixante-cinq ans, - il y a lieu de le croire du moins. Mais il est grand, sec, droit sous son sayon jaunâtre moins poilu que sa poitrine, et un peintre ne dédaignerait pas d'en saisir la silhouette, lorsque, coiffé d'un chapeau de sparterie, vrai bouchon de paille, il s'accote sur soit bâton à bec de corbin, aussi immobile qu'un roc. Au moment où les rayons pénétraient à travers la brisure de l'ouest, Frik se retourna ; puis, de sa main à demi fermée, il se fit un porte-vue - comme il en eût fait un porte-voix pour être entendu au loin et il regarda très attentivement. Dans l'éclaircie de l'horizon, à un bon mille, niais très amoindri par l'éloignement, se profilaient les formes d'un burg. Cet antique château occupait, sur une croupe isolée du col de Vulkan, la partie supérieure d'un plateau appelé le plateau d'Orgall. Sous le jeu d'une éclatante lumière, son relief se détachait crûment, avec cette netteté que présentent les vues stéréoscopiques. Néanmoins, il fallait que l'oeil du pâtour fût doué d'une grande puissance de vision pour distinguer quelque détail de cette masse lointaine. Soudain le voilà qui s'écrie en hochant la tête Vieux burg !... Vieux burg !... Tu as beau te carrer sur ta base !... Encore trois ans, et tu auras cessé d'exister, puisque ton hêtre n'a plus que trois branches ! » Ce hêtre, planté à l'extrémité de l'un des bastions du burg, s'appliquait en noir sur le fond du ciel comme une fine découpure de papier, et c'est à peine s'il eût été visible pour tout autre que Frik à cette distance. Quant à l'explication de ces paroles du berger, qui étaient provoquées par une légende relative au château, elle sera donnée en son temps. Oui ! répéta-t-il, trois branches... Il y en avait quatre hier, mais la quatrième est tombée cette nuit... Il n'en reste que le moignon... je n'en compte plus que trois à l'enfourchure... Plus que trois, vieux burg... plus que trois ! » Lorsqu'on prend un berger par son côté idéal, l'imagination en fait volontiers un. être rêveur et contemplatif ; il s'entretient avec les planètes ; il confère avec les étoiles ; il lit dans le ciel. Au vrai, c'est généralement une brute ignorante et bouchée. Pourtant la crédulité publique lui attribue aisément le don du surnaturel ; il possède des maléfices ; suivant son humeur, il conjure les sorts ou les jette aux gens et aux bêtes - ce qui est tout un dans ce cas ; il vend des poudres sympathiques ; on lui achète des philtres et des formules. Ne va-t-il pas jusqu'à rendre les sillons stériles, en y lançant des pierres enchantées, et les brebis infécondes rien qu'en les regardant de l'oeil gauche ? Ces superstitions sont de tous les temps et de tous les pays. Même au milieu des campagnes plus civilisées, on ne passe pas devant un berger, sans lui adresser quelque parole amicale, quelque bonjour significatif, en le saluant du nom de pasteur » auquel il tient. Un coup de chapeau, cela permet d'échapper aux malignes influences, et sur les chemins de la Transylvanie, ou ne s'y épargne pas plus qu'ailleurs. Frik était regardé comme un sorcier, un évocateur d'apparitions fantastiques. A entendre celui-ci, les vampires et les stryges lui obéissaient ; à en croire celui-là , on le rencontrait, au déclin de la lune, par les nuits sombres, comme on voit en d'autres contrées le grand bissexte, achevalé sur la vanne des moulins, causant avec les loups ou rêvant aux étoiles. Frik laissait dire, y trouvant profit. Il vendait des charmes et des contre-charmes. Mais, observation à noter, il était lui-même aussi crédule que sa clientèle, et s'il ne croyait pas à ses propres sortilèges, du moins ajoutait-il foi aux légendes qui couraient le pays. On ne s'étonnera donc pas qu'il eût tiré ce pronostic relatif à la disparition prochaine du vieux burg, puisque le hêtre était réduit à trois branches, ni qu'il eût hâte d'en porter la nouvelle à Werst. Après avoir rassemblé son troupeau en beuglant à pleins poumons à travers un long bouquin de bois blanc, Frik reprit le chemin du village. Ses chiens le suivaient harcelant les bêtes - deux demi-griffons bâtards, hargneux et féroces, qui semblaient plutôt propres à dévorer des moutons qu'à les garder. Il y avait là une centaine de béliers et de brebis, dont une douzaine d'antenais de première année, le reste en animaux de troisième et de quatrième année, soit de quatre et de six dents. Ce troupeau appartenait au juge de Werst, le biró Koltz, lequel payait à la commune un gros droit de brébiage, et qui appréciait fort son pâtour Frik, le sachant très habile à la tonte, et très entendu au traitement des maladies, muguet, affilée, avertin, douve, encaussement, falère, clavelée, piétin, rabuze et autres affections d'origine pécuaire. Le troupeau marchait en masse compacte, le sonnailler devant, et, près de lui, la brebis birane, faisant tinter leur clarine au milieu des bêlements. Au sortir de la pâture, Frik prit un large sentier, bordant de vastes champs. Là ondulaient les magnifiques épis d'un blé très haut sur tige, très long de chaume ; là s'étendaient quelques plantations de ce koukouroutz », qui est le maïs du pays. Le chemin conduisait à la lisière d'une forêt de pins et de sapins, aux dessous frais et sombres. Plus bas, la Sil promenait son cours lumineux, filtré par le cailloutis du fond, et sur lequel flottaient les billes de bois débitées par les scieries de l'amont. Chiens et moutons s'arrêtèrent sur la rive droite de la rivière et se mirent à boire avidement au ras de la berge, en remuant le fouillis des roseaux. Werst n'était plus qu'à trois portées de fusil, au-delà d'une épaisse saulaie, formée de francs arbres et non de ces têtards rabougris, qui touffent à quelques pieds au-dessus de leurs racines. Cette saulaie se développait jusqu'aux pentes du col de Vulkan, dont le village, qui porte ce nom, occupe une saillie sur le versant méridional des massifs du Plesa. La campagne était déserte à cette heure. C'est seulement à la nuit tombante que les gens de culture regagnent leur foyer, et Frik n'avait pu, chemin faisant, échanger le bonjour traditionnel. Son troupeau désaltéré, il allait s'engager entre les plis de la vallée, lorsqu'un homme apparut au tournant de la Sil, une cinquantaine de pas en aval. - Eh ! l'ami ! » cria-t-il au pâtour. C'était un de ces forains qui courent les marchés du comitat. On les rencontre dans les villes, dans les bourgades, jusque dans les plus modestes villages. Se faire comprendre n'est point pour les embarrasser ils parlent toutes les langues. Celui-ci était-il italien, saxon ou valaque ? Personne n'eût pu le dire ; mais il était juif, juif polonais, grand, maigre, nez busqué, barbe en pointe, front bombé, yeux très vifs. Ce colporteur vendait des lunettes, des thermomètres, des baromètres et de petites horloges. Ce qui n'était pas renfermé dans la balle assujettie par de fortes bretelles sur ses épaules, lui pendait au cou et à la ceinture un véritable brelandinier, quelque chose comme un étalagiste ambulant. Probablement ce juif avait le respect et peut-être la crainte salutaire qu'inspirent les bergers. Aussi saluat-il Frik de la main. Puis, dans cette langue roumaine, qui est formée du latin et du slave, il dit avec un accent étranger Cela va-t-il comme vous voulez, l'ami ? - Oui... suivant le temps, répondit Frik. - Alors vous allez bien aujourd'hui, car il fait beau. - Et j'irai mal demain, car il pleuvra. - Il pleuvra ?... s'écria le colporteur. Il pleut donc sans nuages dans votre pays ? - Les nuages viendront cette nuit... et de là -bas... du mauvais côté de la montagne. - A quoi voyez-vous cela ? - A la laine de mes moutons, qui est rèche et sèche comme un cuir tanné. - Alors ce sera tant pis pour ceux qui arpentent les grandes routes... - Et tant mieux pour ceux qui seront restés sur la porte de leur maison. - Encore faut-il posséder une maison, pasteur. - Avez-vous des enfants ? dit Frik. - Non. - Etes-vous marié ? - Non. » Et Frik demandait cela parce que, dans le pays, c'est l'habitude de le demander à ceux que l'on rencontre. Puis, il reprit D'où venez-vous, colporteur ?... - D'Hermanstadt. » Hermanstadt est une des principales bourgades de la Transylvanie. En la quittant, on trouve la vallée de la Sil hongroise, qui descend jusqu'au bourg de Petroseny. Et vous allez ?... - A Kolosvar. » Pour arriver à Kolosvar, il suffit de remonter dans la direction de la vallée du Maros ; puis, par Karlsburg, en suivant les premières assises des monts de Bihar, on atteint la capitale du comitat. Un chemin d'une vingtaine de milles [Environ 150 kilomètres.] au plus. En vérité, ces marchands de thermomètres, baromètres et patraques, évoquent toujours l'idée d'êtres à part, d'une allure quelque peu hoffmanesque. Cela tient à leur métier. Ils vendent le temps sous toutes ses formes, celui qui s'écoule, celui qu'il fait, celui qu'il fera, comme d'autres porteballes vendent des paniers, des tricots ou des cotonnades. On dirait qu'ils sont les commis voyageurs de la Maison Saturne et Cie à l'enseigne du Sablier d'or. Et, sans doute, ce fut l'effet que le juif produisit sur Frik, lequel regardait, non sans étonnement, cet étalage d'objets, nouveaux pour lui, dont il ne connaissait pas la destination. Eh ! colporteur, demanda-t-il en allongeant le bras, à quoi sert ce bric-à -brac, qui cliquète à votre ceinture comme les os d'un vieux pendu ? - Ça, c'est des choses de valeur, répondit le forain, des choses utiles à tout le monde. - A tout le monde, s'écria Frik, en clignant de l'oeil, - même à des bergers ?... - Même à des bergers. - Et cette mécanique ?... - Cette mécanique, répondit le juif en faisant sautiller un thermomètre entre ses mains, elle vous apprend s'il fait chaud ou s'il fait froid. - Eh ! l'ami, je le sais de reste, quand je sue sous mon sayon, ou quand je grelotte sous ma houppelande. » Évidemment, cela devait suffire à un pâtour, qui ne s'inquiétait guère des pourquoi de
Accueil Le cycle de torrents Tome III Jan et Thérèse Infos détaillées Résumé Acheter Le cycle de torrents Tome III Jan et Thérèse de Marie-Anne Desmarest d'occasion. chez J'ai Lu Genre Roman 219 pages Paru en 1980 dans cette collection EAN 2277211222 Dans ce lointain Transvaal, trois êtres se sont détruits sous les yeux de Thérèse le Dr Jan Yvarsen, que le désespoir a conduit au seuil de la folie, sa femme, Ide, précipitée dans la mort, Sigrid, l'intruse diabolique, belle, fugitive maudite... Drame aussi pour Thérèse, la jeune infirmière, secrètement éprise de Jan... Et puis, dominant sa peine, elle a épousé James Corsen. Quand il meurt dans un accident, Thérèse se retrouve seule, les images du passé refluent.. En Suède, Jan s'est ressaisi. Créateur d'un centre médical, il lance un appel à tous les concours. Et Thérèse y répond. Elle ignore que Sigrid, après des années d'errance, est de retour à Stockholm Source J'ai Lu Source Denoël Source Denoël Source Denoël Le cycle de torrents Tome III Jan et Thérèse
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